mardi 5 juin 2012

La mantra du ponceur


Ou comme ils disaient dans la légion romaine: age quod agis. Merci Pascal.

Work most foul

J'ai fait l'anti-fouling samedi. Quelle poisse! D'abord, il y a la frustration du ponçage, qui ne débarrasse que très imparfaitement la coque des bases calcifiées des balanes. Car à la différence des berniques, qui se maintiennent sur la coque par la seule force de leurs baisers (fort pudiques, elle cachent leurs ébats amoureux sous de grands chapeaux chinois), les balanes sont maçonnes. Ces crustacés dont la morphologie emprunte quelques termes à l'architecture navale sont expertes en fondations: impossible de raser leurs petites maisons sans laisser quelques traces de leur passage. 

J'espérais faire disparaitre les myriades de petites taches blanches sous l'anti-fouling. La première couche ne m'a donné aucune satisfaction - la coque semblait couverte de verrues. La prononciation française confond anti-fouling et anti-fooling, ce qui pourrait se traduire par "anti-dupe" ou "mesures prises pour ne pas se faire avoir". How apt... J'ai beau y mettre toute la mauvaise foi du monde, je ne suis pas dupe de la mauvaise qualité de mon travail.

Il reste un peu de produit: je me décide à suivre les instructions et à passer une seconde couche, sans trop y croire. Les premiers coups de rouleau sont décevants. Au bout de quelques minutes, je reviens sur mes pas et frustré du résultat, je donne un coup de rouleau vengeur sur la seconde couche et là... miracle!

Le rouleau est sec et en passant sur la seconde couche encore humide, il colle à la surface et la hérisse d'une multitude de petits picots, qui en reflétant la lumière masquent toutes les imperfections de la coque. C'est le fameux effet mat... J'ai réussi mon fooling!  

Mais Raymond n'est le fool de personne.

- Qu'est-ce que tu lui as mis comme anti-fouling?
- Quatre litres de Castellano...
- Castellano... de Marseille? C'est du bon, ça...
- Oui, c'est ce qu'on m'a dit.
- Et tu l'as payé combien?
- 120€.
- 120€... Ouais... Et combien de temps tu veux le laisser à l'eau, ton bateau?
- Jusqu'à la fin octobre - environ 5 mois.
- Alors pourquoi tu t'emmerdes à lui mettre un anti-fouling à 120€, pour seulement cinq mois, quand celui de la Coopérative, que tu aurais payé le quart du prix, aurait très bien fait l'affaire...

Qu'est-ce que je peux répondre à ça, hein?

mercredi 15 février 2012

Le rail de foc et le réglage du point de tire


> Lorsque le chariot est à l'avant, l'écoute tire sur la chute et la bordure se détend. Le bas du foc est déventé. Plus de puissance, moins de finesse: meilleur au portant.


> Lorsque le charriot est à l'arrière, l'écoute tire sur la bordure et la chute se détend. Le haut du foc est déventé. Couloir plus large entre le foc et la grand voile. Moins de puissance (twist et voile aplatie), plus de finesse: meilleur au près et dans la brise

lundi 13 février 2012

Lazy Suzy

Voila ce qui arrive lorsqu'on épouse une dyslexique adorable du nom de Susanna - le Lazy Jack devient Lazy Suzy, et ce n'est pas moi qui l'ai dit. Depuis des années qu'elle me demande d'en installer un, ce lien devrait me servir d'aide-mémoire:

http://www.hisse-et-oh.com/articles/850-installation-de-lazy-jack-rapide

dimanche 13 juin 2010

Tout là-haut

Il est possible de grimper au mat du FC10, sans avoir l'impression de mettre sa vie en danger. C'est Susanna qui le dit, or elle en sait quelque chose: c'est elle qui est montée! En dépit de son extrême finesse, de son cintre et de sa quête inquiétante, il ne bronche pas. Frappée à un baudrier d'escalade, côté grimpeur, enroulée au winch, côté assureur, la drisse de grand-voile permet de hisser un équipier jusqu'au sommet, sans difficulté. Tout n'est pas cependant aussi simple qu'il paraît.

Pour commencer, sur le gréement fractionné du FC10, seule la drisse de grand-voile arrive jusqu'au sommet du mat. Celle du génois s'arrête deux mètres plus bas, ce qui signifie que pour respecter le sacrosaint principe du double assurage (toujours être relié à deux points différents) il faut passer au-dessus du "relais" et par conséquent, prendre un peu de mou dans la dernière longueur. De fait, tout le monde fait l'économie du double assurage.

Si l'on veut employer une échelle de mat - inutile si l'on ne compte rester là-haut qu'une minute, le temps de changer une ampoule, mais plus que recommandée si on veut y installer une antenne ou si on est tout seul - il faudra:

> frapper une corde d'assurage à la drisse de grand voile, qui soutient par conséquent l'échelle et une corde supplémentaire
> ruser (avec des élastiques) pour éviter que les échelons ne se coincent dans les bastaques quand on hisse l'échelle.
> garnir l'échelle de coulisseaux pour qu'elle épouse la forme du mat.

Pour référence, il faut une échelle de 11 m.

Et si l'on est tout seul? Monter à l'échelle de mat, en s'assurant à l'aide d'un bloqueur sur la corde d'assurage, ou grimper avec deux bloqueurs, comme en spéléo, sur la drisse de grand-voile. La première solution me parait beaucoup plus confortable, plus sûre et moins dommageable pour la drisse.

Susanna, merci pour ta légèreté, ton insouciance et ton indéfectible confiance - elle ne cesse de m'étonner - sans lesquelles nous serions encore en train de discuter sur le pourquoi et le comment, au pied du mat.

lundi 7 juin 2010

Taches de rousseur

Il arrive que d'une semaine à l'autre, le gelcoat se recouvre de milliers de petites taches de rouille. Aussi fulgurant qu'une varicelle, ce phénomène est dû aux fines poussières métalliques qui, au voisinage des chantiers et partout où les meuleuses meulent les coques acier, sont transportées par le vent et semées sur le pont des voisins. Au bout de quelques jours, l'oxydation des micro-particules transforme le gelcoat en peau de rouquin.

Il suffit pour s'en débarrasser de diluer l'équivalent d'une cuillère à soupe d'acide oxalique dans un bol d'eau et de l'appliquer avec une éponge sur les zones contaminées. Pas besoin de frotter: les taches disparaissent en quelques instants, comme par magie.

L'acide oxalique ressemble à du sucre blanc, ne coute pas cher et s'avère aussi efficace contre la rouille que pour faire disparaitre les noircissures sur le bois. Merci Raymond.

mardi 25 mai 2010

ET/OU

Le hâle-bas et/ou le rail d'écoute de grand-voile

Sur le FC-10, ils jouent le même rôle à des allures différentes. En abaissant la bôme:

> ils aplatissant le bas de la grand-voile,
> ils cintrent le mat,
> et ils tendent la chute.

Ce faisant:

> ils abaissent le centre de pression vélique,
> ils réduisent la puissance et la gîte,
> et ils augmentent la finesse.

Le hale-bas aux allures portantes, le rail d'écoute aux allures de finesse.

Au portant, le charriot du rail d'écoute est toujours déporté sous le vent, sauf au moment de l'empannage, lorsqu'il est préférable de le coincer temporairement au milieu. De fait, c'est le hâle-bas qui fait tout le travail. Au fur et à mesure que le vent forcit, on souque le hâle-bas pour abaisser le centre de pression vélique et aplatir le bas de la grand voile, réduisant ainsi sa puissance. En cas de départ au lof, on le choque à plein pour éviter que la bôme ne vienne se fracasser sur l'eau. Plus on choque le hâle-bas, plus on tend la chute. Or il est bon de maintenir un peu de dévers tant dans les petits airs que dans la brise.

Au près, le hâle-bas peut prêter main forte au rail d'écoute pour abaisser la bôme, mais c'est ce dernier qui fait presque tout le travail. En descendant sous le vent à mesure que la brise fraichit, il permet d'ouvrir le plan de voilure (meilleure orientation de la force propulsive), de naviguer avec une voile la plus plate possible, à la limite du fasseyement; il aide aussi à cintrer le mat (en conjonction avec le hâle-bas, les bastaques et le pataras). Le charriot peut remonter au vent dans deux circonstances: dans les petits airs, pour fermer le plan de voilure, creuser la voile et gagner un peu de puissance en "capturant" le peu de vent disponible, et dans la brise, pour détendre la chute et permettre au haut de la voile de déverser, réduisant ainsi la puissance et la gîte. Dans ces deux cas, on remonte le charriot tout en choquant l'écoute. En aucun cas la bôme ne doit remonter en-deçà de l'axe du bateau;

Tout dépend, en fin de compte, du type de voilier. Les petits dériveurs n'ont pas de rail d'écoute et certains catamarans se passent de hale-bas. LE FC-10 possède les deux.

jeudi 13 mai 2010

Remerciements

Je ne sais pas qui se cache derrière les pseudonymes, mais les habitués des forums de Hisse et oh! s'y reconnaitront. Dans le désordre: brillac4, qui lui aussi roule en FC-10, petitjaune, phifi34, pitalugue, gérard, benoît...

Et puis, il y a Raymond Col, Raymond l'Inénarrable, Raymond l'Aventure, le Provocateur, le Grand Pédagogue.

Twist and shout

Également appelé dévers ou vrillage, le twist se réfère à la forme hélicoïdale d'une voile.

Il a toute son importance aux allures de finesse, lorsque l'air se déplace à la surface des voiles en flux laminaires. C'est donc principalement au près qu'on en tient compte dans le réglage des voiles.

Comme le vent est toujours plus fort au sommet qu'au pied du mat, à rendement égal, l'angle d'incidence du vent en haut et en bas de la voile ne seront pas les mêmes. Pour la même raison, le vent adonne toujours plus au sommet du mat, où la composante vent réel du vent apparent est supérieure à celle que l'on trouve au pied du mat. Le dévers de la voile matérialise cette différence de vitesse et d'orientation du vent.

Plus l'air est humide, plus la couche limite à la surface de la mer est épaisse, plus les différences de valeur entre le haut et le bas du mat seront importantes.

Dans les petits airs, la différence entre le haut et le bas est à son comble - on a donc tout intérêt à maintenir un dévers important, en choquant le hâle-bas à plein et en gardant le charriot de barre d'écoute au milieu de son rail, de manière à laisser à la bôme sa liberté de mouvement.

Au fur et à mesure que la brise se lève, le rapport vent vitesse / vent réel diminue, la direction du vent en haut du mat se rapproche de celle en bas et le dévers perd un peu de sa raison d'être initiale. On aura donc tendance, dans le medium, à aplatir la voile et à réduire le dévers. Parallèlement, on ouvre le plan de voilure, ce qui revient à réduire l'angle d'incidence de la voile par rapport au vent: ce faisant, on "abaisse le point d'application de la force de dérive, améliorant l'équilibre en gîte du bateau, et on oriente mieux la force aérodynamique" (Manuel des Glénans, édition 1998). Concrètement: on descend le charriot de grand-voile sous le vent tout en souquant l'écoute, ce qui a pour effet de faire descendre la bôme, tendre la chute et aplatir la voile. On peut aussi souquer le hâle-bas. Tout ceci, tant que l'on veut conserver un maximum de puissance, sur toute la hauteur de la voile.

La brise fraîchissant, on peut avoir envie de sacrifier un peu de puissance, pour réduire la gîte par exemple. Dans ces conditions, augmenter le dévers permet de déventer le haut de la voile & de réduire la puissance et la gîte (l'alternative consistant à prendre un ris, solution préférable sur un long bord). Il y a deux manières d'augmenter le dévers au près dans la brise:

> En souquant le pataras (pour plus d'efficacité, on mollira au préalable la basse bastaque): c'est la méthode préconisée pour les mats souples et les gréements fractionnés comme ceux du FC-10.

> En défaisant les réglages de medium: choquer le hâle-bas, remonter le charriot de grand-voile au vent et choquer l'écoute de grand-voile. Résultat: la bôme remonte, la chute se détend, le guindant se dévente, la voile porte moins bien mais le haut de la voile s'ouvre, le bateau se calme, provisoirement.

En ce qui concerne la voile avant, au près, le charriot évolue entre le milieu et l'arrière du rail, sachant que plus le charriot recule, plus la bordure est tendue et plus la chute s'ouvre: voile plus plate en bas (cap) et plus de dévers en haut (puissance réduite).

Par mauvais temps, on cherche à conserver un minimum de dévers: une voile vrillé tolère mieux la gîte, les changements de vitesse et de direction du vent, réduisant ainsi les risques de décrochage.

mardi 11 mai 2010

Satanées bastaques! Infernal running backstays!

C'est là que les ennuis ont commencé. Dès le premier jour. Ni l'expert, ni l'ex-propriétaire n'ont su me dire à quoi elles servaient, et pour cause, plus personne ne s'en sert, à l'exception de quelques régatiers.

De nos jours, on les trouve principalement sur les bateaux de course, et plus particulièrement sur les gréements fractionnés. Les hautes bastaques sont fixées au mat au niveau du capelage d'étai; les basses bastaques, à mi-chemin entre le capelage et le vit-de-mulet.

Autrefois utilisées en renfort du pataras pour améliorer la tenue longitudinale du mat, elles continuent de jouer ce rôle structurel sur les gréements non-poussants (dits aussi latéraux ou "dans l'axe") comme celui du Sélection. Sur les gréements poussants (dit angulés, toujours en référence à l'angle formé par les barres de flèches), comme celui du FC-10, ce n'est plus leur fonction principale (même si l'on continue de reprendre les bastaques au vent, au près comme au portant, lorsque la brise fraichit, pour tenir le mat).

Sur le FC-10, les bastaques servent principalement à régler et à contrôler le cintre du mat. Le régler pour gagner en finesse ou en puissance, le contrôler pour éviter les deux calamités que sont la pompe et le cintre inversé.

Au près, dans les petits airs, on souque la basse bastaque au vent pour réduire le cintre du mat au strict minimum et creuser la grand-voile, ce qui permet de gagner en puissance. On reprend légèrement la haute bastaque au vent pour éviter un cintre inversé. Dans le pétole, on préconise parfois la tactique inverse, qui consiste à aplatir autant que possible la grand voile (comme dans la brise) pour ne pas entraver les micro-flux de l'air et gagner un peu de force propulsive.

Au près, dans la brise, on choque la basse bastaque au vent pour permettre au mat de cintrer, ce qui aura pour effet d'aplatir le bas de la grand-voile, de réduire sa puissance et d'améliorer le cap. On souque la haute bastaque pour simultanément raidir l'étai, ce qui améliore l'attaque de la voile avant, et cintrer le mat. Avant de prendre un ris, on souquera le pataras pour déventer le haut de la grand-voile et augmenter le dévers.

Au portant, dans les petits airs, on choque les bastaques à plein.

Au portant, dans la brise, on reprend les bastaques au vent, sans excès - le but n'est pas de cintrer le mat, seulement d'éviter une quête négative - en commençant par les hautes bastaques, pour éviter un cintre inversé. Dans cette configuration, l'emploi des bastaques n'est pas sans risque: en cas d'empannage intempestif, la bôme viendra frapper la bastaque au vent, qui si elle n'est pas larguée à temps, peut briser le mat.Cette éventualité figure en tête de tous les scénarios-catastrophe que l'on peut lire sur le gréement à bastaques. 

Dans le clapot, le mat relativement souple du FC-10 a tendance à pomper (cintrage répétitif qui peut mettre le mat en danger). Souquer la basse bastaque et reprendre la haute (toujours pour éviter un cintre inversé) permet de blinder le mat et d'écarter le danger.

Remerciements: Brillac4, qui possède lui aussi un FC10 et grâce auquel j'ai finalement compris à quoi servaient les bastaques, après six mois de malentendus.

mardi 4 mai 2010

Ignoramus!

Bénis soient les ignorants, car c'est à eux que s'adressent les modes d'emploi. Or quoi de plus merveilleux, de plus providentiel, de plus rassurant - et dieu sait que nous avons besoin d'être rassurés! - qu'un ouvrage qui promet de tout expliquer, sans exiger de nous la moindre connaissance préalable?

Ce devrait donc être une belle chose qu'un mode d'emploi - une chose utile et belle, n'en déplaise à Charles Baudelaire - un ouvrage qui s'efface si bien devant son sujet qu'après nous en avoir dévoilé le fonctionnement le plus intime, il se laisse gentiment oublier.

Mais les voiliers, c'est bien connu, sont vendus sans mode d'emploi. Loin d'être un oubli, cette omission est pleine de sous-entendus: "si vous ne savez pas comment ça marche, optez plutôt pour un kayak, une planche à voile ou un stage aux Glénans". Vient le jour, cependant, quand on a fait tous les stages, passé tous les permis et lu cinquante fois l'incontournable Manuel, où l'on décide d'acheter son premier voilier. Le destin a voulu que nous tombions sur un First Class 10, un bolide mi-goéland mi-sardine, avec autant de réglages qu'un avion de chasse! Ce jour là, j'aurais tout donné (le peu qu'il nous restait) pour un mode d'emploi.

Nos premières sorties en famille furent épiques. D'octobre à mai, le lion rugit un jour sur deux dans le golfe qui porte son nom. Il faut qu'un dieu, nous ayant trouvé amusants, ait voulu faire durer le plaisir – sans compter les vieux marins qui, rigolards, observaient notre rodéo hebdomadaire depuis la rive - car nous sommes toujours rentrés au port, mon amour-propre en berne, mais sains et saufs.

Il nous aura fallu, pour amadouer l'animal, naviguer par tous les temps, ne pas se décourager, et fréquenter les forums (il y a des forums consacrés aux machines à laver; d'autres, aux variétés de topinambours - ailleurs, c'est le réglage des basses bastaques et le dosage de la résine époxy qui déchaine les passions).

Parvenu au terme de cette première prise en main, je pense avoir plus ou moins compris comment fonctionnait notre pur-sang en fibre de verre - la mer, quant à elle, conserve tout son mystère.

Je n’en ai pas moins gardé la nostalgie du mode d'emploi que je n’ai jamais lu, ainsi qu'une saine envie d'exorciser tous les mauvais conseils auxquels j'ai dû, chemin faisant, prêter foi.

Donc acte!